« Bande d'incapables ! Et vous vous appelez "déménageurs" ? C'est un vase Ming, d'une valeur inestimable, que vous venez de briser, crétins décérébrés ! » Irritée était encore un mot trop faible pour décrire mon état d'esprit actuel. Je n'avais déjà pas été enjouée à l'idée de partir pour la Nouvelle-Orléans mais l'incident qui venait de se produire était le summun de l'idiotie. Puisque nous avions trouvé une nouvelle demeure où loger en attendant que la situation se calme, il avait fallu employer des gens pour installer les meubles dans les grandes salles vides qui composaient cette villa. Vous ne vous attendiez tout de même pas à ce que nous habitions dans une vulgaire maison, quand même ? Inepties. Mais les gros balourds qui servaient à déplacer les trésors accumulés depuis des siècles venaient de briser un chef-d'oeuvre de la céramique chinoise datant du milieu du quatorzième siècle. Ils semblaient penser se racheter en me lançant des regards désolés, mais cela ne suffisait pas, au grand non. « Dégagez de là, misérables incompétents. J'irai chercher ailleurs, puisque c'est comme ça. Ne touchez plus à rien, par pitié ! Vous seriez capable de créer un incendie. » Il grommelèrent avant de s'en aller piteusement, laissant la porte ouverte. Jurant entre mes dents, j'allais claquer celle-ci, faisant résonner le bruit jusqu'à l'étage. Elijah s'en était allé très tôt ce matin et je ne pensais même pas à réfléchir au cas de Kol, il faisait sa vie comme il l'entendait, cet ingrat. Je remis une mèche blonde derrière mon oreille, réfléchissant à ce qui pouvait rendre ma journée plus agréable, parce qu'elle avait commencé sur les chapeaux de roue. Je n'avais pas envie d'aller enquiquiner quelqu'un, aujourd'hui, étrangement même. Déroulant mentalement une liste des visages qui m'étaient familiers, je m'arrêtai sur un plus particulier. Un visage qui aurait dû me dégoûter, sachant qu'il était lié à la plupart des soucis qui nous avaient emmené à fuir Mystic Falls, mais qui ravivait plutôt de doux souvenirs, les souvenirs d'une existence paisible et agréable. Où je n'avais à me soucier que du beau temps, de la robe que j'allais choisir soigneusement pour sortir, de la quiétude qui subsistait dans ma famille.

Tatia Petrova avait été ma première amie, celle avec qui je m'étais liée depuis le premier regard. Un visage ovale, doté de traits fins et délicats, mangé par deux prunelles brunes et profondes. Une cascade d'ondulations de la même teinte, qui m'avait rendu folle de jalousie, comparé aux miens, blonds et raides. Mais derrière ce visage fascinant et dangereux tant il était envoûtant, se trouvait être un esprit tendre et compréhensif, qui ne voulait qu'apaiser les pleurs et donner le sourire à ceux qui pouvaient se prétendre lui être proche. Mais la famille Mikaelson avait été obscure avec elle, lui donnant une fin tragique puisqu'elle avait été la source de notre immortalité. Au temps de notre rencontre, je souviens avoir été une jeune fille romantique et heureuse de vivre, a contrario de la déception permanente à laquelle j'avais fait face depuis ma transformation. Nous étions faite pour nous trouver et j'étais tombée sur la perle rare. Sa perte avait été quelque chose de lourd, pour moi, étant relativement choquant de la retrouver, plus d'un millénaire plus tard. J'avais beau avoir changé, du côté sombre, dirons-nous, il restait que je ne pouvais m'empêcher d'être agréable avec elle, du moins, autant que je le pouvais. Elle me rappelait la douce époque où je n'avais pas à avoir peur, à être déçue, celle où je croquais pleinement la vie. Ce fut la sonnette de la porte d'entrée qui me sortit de mes pensées étranges, et je me rendis à vitesse surhumaine à cet endroit. En quelques secondes, j'avais ouvert la porte.

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